Un vol est un vol. Mais il faudra différencier le vol pour la première fois du vol répété.
Le vol abolit les frontières entre ce qui est à moi et ce qui est à l’autre. Si pour le petit enfant il s’agit plutôt de faire un « essai pour voir ce que cela fait », en même temps il s’agit souvent de vivre la volupté de réaliser un acte interdit par les parents et accessoirement par la société.
Chez le petit, le vol est un comportement, que je qualifierais de presque naturel et même assez logique, chez la petite enfance. Point de doute, il n’y a pas de génétique du vol. Souvent les « petits voleurs » font leurs premières tentatives vers 4 ans. En fait, à cet âge l’on ne fait pas vraiment le différence entre ce qui est à soi et ce qui est aux autres. L’on a pas non plus intégré toutes les notions de culpabilité, et c’est justement par la transgression des interdits et par la sanction des adultes, que l’enfant intègre cette culpabilité et donc grandi. Bref, chez le petit, le vol n’est pas si gravissime que cela.
Par contre chez l’adolescent, cela prend une autre dimension. Rappelons que l’adolescence commence vers 12 ans pour les plus précoces.
Punir contre le vol, c’est respecter et faire respecter un interdit qui remonte depuis les débuts de l’histoire de l’humanité. Ainsi, comme chez le petit il est hors de question de laisser passer quoi que ce soit. La sanction ne devra pas être proportionnelle à l’objet, mais aux circonstances (atténuantes ou non). Elle doit être immédiate et sans appel. Tout du moins elle doit suivre une conversation préalable avec l’adulte. Un vol est un vol. Il n’y en a pas de moins grave. Donc symboliquement il convient de toujours marquer le coup. Et pas la peine de culpabiliser sur de prétendues raisons psychologiques (même s’il y en a forcément).
On imagine déjà les parents en larmes se posant de multiples questions : « mais qu’est ce que j’ai fais, je dois être un mauvais parent », ou encore « cet enfant doit peut-être avoir un sort sur lui »…
Il ne faut rien exagérer non-plus. Sachez évidemment que parents, vous êtes les premiers modèles d’identification de vos enfants. Aussi, s’il vous arrive de frauder, de mentir ou de ne pas tenir votre promesse, vous n’aurez aucune crédibilité ; et si vous vous permettez ce type de comportement, il est fort à parier que l’enfant vous imite quelque part. Le « fais ce que je dis mais pas ce que je fais » n’a aucun sens. De même que lorsqu’on promet sanction, on s’y tien (le couple doit être en accord et ne rien lâcher).
Il est très important de culpabiliser l’enfant : c’est en le culpabilisant qu’il va intégrer les interdits sociaux. Mais pas trop non-plus. Il y a un juste milieux : montrez votre tristesse au fait que votre enfant ait volé. Montrez vos émotions. Rappelez que les voleurs finissent en prison. Pas la peine pour autant de le stigmatiser dans la famille : souvent les parents (frères, soeurs, oncles…) d’une même famille, comparent leurs gamins entre adultes ; une étiquette de « voleur », peut donc se déposer sur l’enfant, et cela peut inconsciemment encourager l’enfant à répondre à cette étiquette : « si je suis un voleur pour ma famille, je vais me comporter comme elle attend que je me comporte », pourrait-il penser.
Bref, le linge sale se lave en famille nucléaire (papa, maman, les enfants).
On constate ceci dit que dans le cas de familles monoparentales, il y a souvent (mais pas toujours) des difficultés d’éducation : ce n’est pas que les parents ne font pas leur travail de parents. C’est simplement du fait qu’il soit plus facilement épuisé psychologiquement et physiquement et que souvent tout seul on soit perdu, confus dans ce qu’il convient de poser comme cadre éducatif.
Par ailleurs, pas la peine de le faire passer par un interrogatoire de type « police » ; en ce cas, vous risqueriez de le repousser dans ses retranchements et donc il utilisera le mensonge.
A mon sens, mieux vaut dire à l’enfant : « tu as quelque chose qui ne t’appartient pas ; tu dois le rendre, sinon je n’en veux pas à la maison ».
Difficile, s’il s’agit d’un jeu volé dans un magasin ; je trouve intéressant que l’ado rapporte en votre présence le jouet volé et s’il est abîmé, qu’il le paie avec son argent de poche (argent de poche présent et à venir). On doit pousser un maximum les enfants à assumer leur bêtise (toute proportion gardée). Que le commerçant soit mécontent, on le comprend. Et qu’il le manifeste, n’est pas dérangeant en soi. Après, pas la peine d’imaginer des ennuis avec la justice, surtout si vous rendez le jeu en bon état ou que le gosse le paie.
Je pense que ne pas obliger l’ado à payer l’objet du vol, ou à le rendre, c’est quelque part, en tant qu’adulte, se rendre complice du vol : « tu as volé, ce n’est pas bien ; mais on ne vas pas le rapporter, car on pourrait avoir des ennuis ; gardons le secret ! ». Au pire si vraiment vous ne vous sentez pas capable de rendre l’objet ou de le payer, faites jeter le jeu par l’enfant. Ou mieux, faites-lui donner le jeu à une organisation caritative. Afin, que lui, ne profite par de son larcin. Et par procuration, vous n’ont plus (vous auriez la paix un instant à la maison, pendant qu’il joue à ce jeu dans sa chambre ?).
L’idée est applicable à n’importe quel l’objet en question.
Quoi qu’il en soit, si l’ado vient répéter ce geste il s’agit peut-être d’un appel à l’aide : « intéressez-vous à moi ». Charge aux parents d’en découvrit la raison de cet appel. Il cherche sans doute à attirer l’attention sur lui, sur sa souffrance pour une raison inconsciente : « je cherche à me faire prendre pour que tu me regardes ».
S’ils ne le peuvent, les psychologues sont là pour permettre à l’enfant de mettre des mots sur sa souffrance. Le vol n’est de toute façon que la démonstration comportementale d’une souffrance ou d’une tension (temporaire ou non) psychologique.
Parfois voler, c’est prendre de la distance avec les valeurs des parents : c’est prendre de la distance avec les parents tout court.
Bref, si cela ne cesse, une thérapie familiale semble toute indiquée : en effet l’ado fait parti d’un système, la famille. Souvent ces comportements sont le résultat d’une mauvaise compréhension, d’une mauvaise communication dans la famille, ou encore d’un non respect des places générationnelles (l’enfant parent de son parent ou encore une pression parentale trop forte pour que l’enfant devienne adulte avant d’en être prêt).
L’on peut aussi parler de cleptomanie : les objets ne sont pas volés pour ce qu’ils sont, c’est plutôt l’acte de voler qui est excitant. Il y a dans ce cas, une forme d’addiction au vol, au sens psychologique et physiologique du terme. Le vol procure une décharge hormonale (adrénaline et endorphine). L’on peut devenir accro à cette décharge et chercher de plus en plus de sensations fortes ! Ces voleurs sont dépressifs et anxieux. Le cleptomane est obliger de voler pour tenir, un peu comme l’alcoolique ne peut se séparer de sa bouteille. C’est une façon , ne serait-ce que pour un instant, de se sentir vivre.
Quoi qu’il en soit, il conviendra de consulter et de faire consulter par le psychologue afin de prendre le problème à corps dès ses débuts : ce n’est souvent que comme cela qu’on arrive à arranger les situations.
Dr David GOULOIS : docteur en psychologie, psychologue, psychothérapeute et sexologue sur l’Ile de La Réunion
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