Les relations mère-fille sont de plus en plus souvent traitées par les spécialistes de la psychologie. C’est que cette relation pose souvent quelques problèmes entre les protagonistes.
En effet, pour maman comme pour sa fille, il n’est pas toujours simple de se comprendre.
Dès l’entrée de la petite fille dans l’Oedipe (entre 3 et 7 ans environ), mère et fille se retrouvent en concurrence pour gagner et maintenir l’amour d’un être, celui du père.
Tous les enfants du monde sont passés par la phase oedipienne, mais selon les cultures, elle s’exprime des fois différemment. Mais peu importe, le résultat en est l’identification nécessaire de la fille à sa mère (ou à celle qui la remplace). Cette mère qui suscite l’intérêt du père, cette mère qui fait des bisous au papa, cette mère qui partage le lit de papa.
Toutes les petites filles (avec une force plus ou moins variable selon les individus, selon le vécu de la famille) ont voulu se marier avec papa et/ou avoir des enfants de lui. C’est comme ça, pas la peine de crier au scandale ou à l’inceste.
Que vous ne vous en souveniez plus n’a rien d’étonnant. En général ces choses là, nous disons, nous les psy que vous les avez « refoulé », c’est-à-dire enfuis dans votre inconscient. L’inconscient c’est cette partie de vous qui dirige en bonne partie votre vie ; partie dont vous ne savez quasiment rien (sinon elle serait consciente). C’est ce qui fait que des fois « c’est plus fort que vous », que « vous ne pouvez pas vous empêcher de… ».
Bref, dans l’Oedipe de l’enfant, la fille va vouloir faire tout comme sa mère, en commençant par vouloir essayer ses habits, se maquiller comme maman. Elle fera des « gâtés » à son papa, qui lui, devra mettre des limites ; accepter oui, des câlins, mais pas trop non plus ; il devra ne pas rentrer dans le jeu de séduction de la petite, et bien signifier qu’il n’a qu’une femme, maman.
Et là, toute cette phase à son importance, parce c’est grâce à cela que la fille ira plus tard chercher un autre objet d’amour que son père : un autre homme.
Quand tout est fait dans ce sens (ou presque), la fille passant par les hauts et les bas de l’adolescence, ira donc prendre de plus en plus son autonomie.
Là pas de souci, la vie suit son chemin.
Mais il y des situations un peu plus particulières : dans certaines familles, à l’inverse la fille sera trop proche de maman. Pourquoi ? Ce sont les mères qui veulent tous savoir de leur enfant : les détails de la relation amoureuse de la fille par exemple. Ou encore, ces mères-filles qui vont se prêter leurs habits, parce que maman s’habille aussi jeune que la fille…Je me souviens d’une famille, ou mère et fille s’échangeaient leurs dessous…
C’est relations sont malsaines. Vous me direz que tout se passe bien avec votre maman, votre fille…Certes, pour l’instant. Oui il y a une grande complicité, vous vous comprenez instinctivement, pour partagez d’excellents moments ensemble…Mais cela ne permettra pas à la fille ni à la mère de se tourner réellement vers les objets d’amour masculins. Bien sur elles auront un mari, mais le couple souffrira. L’homme fera sa vie de son côté parce qu’il n’a pas sur séparer mère et fille de leur fusion, qu’il n’a pas sur faire en sorte que sa fille fasse son Oedipe sur lui (absences du père ? non participation à l’éducation des enfants ? Non communication avec les enfants ? ). Mais aussi parce que la mère ne lui a pas laissé être le support de l’Oedipe de sa fille. La mère jalouse de la relation fille-père, aura souhaité inconsciemment exclure le père. Le père lui n’a pas vraiment sa place dans cette famille.
Mère et fille forment le couple de la famille.
Je me rappelle d’une patiente qui jusqu’à 6 ans tétait le sein, qui, jusqu’à 9 ans dormait entre papa et maman, parce que la fille faisait des cauchemars. Ce qui arrange bien madame, afin de fuir les rapports sexuels avec monsieur. La mère introduit ainsi la fille, comme un tiers séparateur entre elle et son mari. Et enfin jusqu’à 14 ans, qui dormait de temps à autre dans la chambre des parents, sur un lit de camps, tenant la main de sa mère dans la sienne. Le tout sans que le père ait son mot à dire.
Un couple qui aura fini par la séparation des parents et une complicité mère-fille qui aura fini par exploser le jour où la mère aura retrouvé un petit-ami : là, la fille deviendra jalouse, refusant la prise d’autonomie de sa mère.
Ou encore, je me souviens d’une mère habillé comme sa fille, au point où il fut difficile de savoir si la mère était la mère ou la soeur. Presque des jumelles…Ah ces relations mères-filles « bonnes copines » ! Pas de place pour les hommes, ou alors juste un peu : pour le sexe, ou pour les enfants, ou encore parce qu’il en faut bien un, pour être « normale » dans la société..
Le truc c’est que cette façon de faire se transmet de génération en génération, à moins que cette chaîne se brise avec l’aide d’un thérapeute.
Alors non il ne faut pas tout partager entre mère et fille ; que la fille se confie de temps en temps à sa mère, qu’elle exprime ses soucis, oui. Réciproquement pourquoi pas, bien que la mère à l’inverse n’ai pas vraiment intérêt à lui confier ses problèmes de couple.
Jusqu’à ce que la fille soit indépendante, qu’elle ait son particulier, la fille peut confier ses problèmes avec les hommes à sa mère, mais le mieux reste les copines. Ou les professionnels.
Enfin, je terminerai par un autre exemple : une mère, critique tous les petits-amis de sa fille, parce que maman ne les trouve jamais assez bien. Parce qu’inconsciemment c’est la mère qui vit la relation amoureuse de sa fille par procuration et/ou parce qu’elle souhaite rester fusionner avec sa fille, et qu’ainsi ces petits-amis sont des dangers pour cette relation conjugale « mère-fille ».
Maman et fille ne doivent pas être copines, ni soeur, au risque de perturber l’identité de chacune, de perturber la construction de sa propre identité de « mère de… », « de fille de…», « de femme de… ».
Au risque de créer une famille en souffrance.
Article parue dans le magazine « Belle », supplément du journal « le Quotidien », Ile de la Réunion.
Dr David GOULOIS : docteur en psychologie, psychologue, psychothérapeute et sexologue sur l’Ile de La Réunion
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