Il s’agit bien de la question qui hante bon nombre de parents et ce depuis fort longtemps !

Version animalière : « Euh, hé bien ma chérie vois-tu, les cigognes, après qu’on ait commandé un bébé dans les 3 Suisses, elle dépose l’enfant devant la maison »…Version printanière : « les garçons naissent dans les choux, les filles dans les roses ». Version écourtée : « Demande à ta mère » !

Cela peut paraître incroyable, mais il semble que beaucoup de parents ne sachent pas comment ils ont fait leurs propres enfants. Alors petit rappel :

Pour faire un bébé il faut une gamète male (entendez par là, la graine du papa) qu’on appel spermatozoïde…Eh bien oui, un jour ou l’autre il faudra bien prononcer ce mot, car scientifiquement parlant, l’on n’en connait pas d’autres. Il faut aussi la gamète femelle (graine de la maman), l’ovule…Attention, l’on dit a tort que l’ovule est un œuf; et bien non, pas encore.

Spermatozoïde et ovule se rencontrent (pas par l’opération du St Esprit) et là, dans la fusion l’on obtient l’œuf humain qui va pousser dans le ventre de maman…

Ben voilà, pas si difficile de l’expliquer à l’enfant.. Si ?

Bon alors je tente autre chose :

« Vois-tu fils, toi tu as une zigoune (nommez-le comme vous voulez : pénis, quéquette, zigounette…). C’est par là que tu fais pipi. Mais c’est par là aussi que sort les graine qui font les bébés. Mais pour faire un bébé il faut aussi une maman…C’est obligé, sinon ça marche pas ». Là normalement, votre enfant devrait d’un seul coup s’en trouver intéressé.

« Les filles, elles n’ont pas de zigoune, elles ont un trou, la vulve (c’est un fait, est bien un trou ; là encore, mettez-y le nom que vous voulez : choupette, choupinette…bref.). Et dans le trou il y a les graines des mamans pour faire aussi des bébés. Quand deux grands, des adultes,  s’aiment ils ont le droit de faire des enfants, des bébés. Seuls les adultes ont le droit : pas deux enfants, et pas un enfant et un adultes : c’est interdit ! Le papa met sa zigoune (c’est le moment le plus dur de votre explication, si si…) dans le trou de maman et fait sortir sa graine. La graine de la maman et celle du papa se mélangent et ça fait un petit petit bébé…On peut même pas le voir, il faut une machine pour ça ». Ouf, on respire. Et on termine : « le bébé il pousse dans le ventre de la maman, et plusieurs mois après, le bébé sort par le trou où on avait mis la graine du papa ».

Magnifique, vous l’avez fait, vous êtes plus ou moins soulagé et tranquille pendant un petit moment.

Alors pourquoi faut-il dire la vérité aux enfants ? Parce que si vous avez pris l’habitude de me lire, vous savez a quel point je prône les relations sincères entre parents et enfants : c’est la base de la confiance et du respect. D’autres part parce que les enfants se font des théories, des idées sur la question : rappelez-vous, quand vous étiez petit (e), ne vous est-il jamais arrivé d’entendre vos parents dans l’ « acte d’amour » ? Alors dites-vous que vos gamins font la même chose. On pense que ça dort, eh bien rien n’est moins sûr.

Quoi qu’il en soit, un enfant qui n’a pas d’explications doit bien se faire une idée pour répondre à sa curiosité : les mamans des fois, ça fait du bruit…Remarque, les papa aussi…Non seulement il sautent sur le lit (ben oui, le lit grince ou tape contre le mur…), mais en plus ils poussent des cris, des gémissements…Mais ??? Mais ??? Il se passerait des choses pas très normales dans la chambre des parents la nuit ? En plus ça doit être brutal puisque ça cri !

Et voilà, comment à ne rien dire à ses enfants, ces derniers en reviennent à se faire des idées négatives sur le sexualité…

Idem : il n’est pas rare qu’un enfant explique la naissance par sa propre logique. Pour lui, le seul trou d’où il sort des choses, c’est le trou des fesses ! Alors bébé sort forcément par là ! D’autant que pour un enfant, faire caca, c’est faire un cadeau à ses parents, alors forcément comme un bébé est normalement un heureux événement, du coup le bébé est aussi un cadeau…

Enfin pour le dernier argument : tout le monde n’est pas à l’aise avec sa sexualité, parce que petit, les parents en ont fait quelque chose de honteux. Ainsi la sexualité conjugale n’est pas vécue positivement, épanouissante, mais plus comme un « devoir conjugal »…

La sexualité c’est la vie, on la pratique tous, tout seul ou à plusieurs, sous des formes aussi variées les unes que les autres. 

A la Réunion (mais pas seulement), la question de la sexualité est difficile à aborder : on en parle en rigolant volontiers. Mais quand il s’agit d’en parler sérieusement, c’est autre chose…Là des fois, on se dégonfle.

Je me souviens d’une patiente, qui à ses 13 ans, ayant eu des règles pour la première fois, croyait qu’elle allait mourir : c’est logique elle perdait son sang, donc faisait une hémorragie.

Bref, l’enfance c’est bien le moment où l’on explique la vie : à l’âge adulte, c’est un peu tard.

La sexualité, avec des mots adaptés en fonction de l’âge l’on peut en parler dès trois ans…On rentre moins dans les détails biologiques, c’est tout. Pervertir l’enfant ? N’importe quoi, la perversion c’est un truc d’adulte… Au contraire, à lui cacher les choses, il tentera maladroitement ou par la force de découvrir ce qu’on lui cache.

Alors ce week-end, on s’y met…Si ce n’est pas déjà fait, on prend un temps pour discuter sérieusement de choses sérieuse de la vie.

Amen.

Article publié dans le magazine « Belle », supplément du « Quotidien », Ile de la Réunion

Dr David GOULOIS : docteur en psychologie, psychologue, psychothérapeute et sexologue sur l’Ile de La Réunion